Traducteur localisateur : une rédaction de styliste
Que signifie localiser ? Adapter un contenu afin qu’il corresponde au mieux à un lectorat ou un marché ciblé. S’agit-il de traduire ? Oui. Mais pas uniquement...
La mondialisation des échanges commerciaux a mis en lumière cette nécessité de comprendre les particularités locales de chaque marché. Articles de blog, site web, application ou produit physique : les entreprises doivent désormais aller au-delà d'une simple traduction de leurs contenus. C’est ainsi que la localisation entre en jeu.
Souvent confondue avec la traduction, la localisation est pourtant un processus autrement complexe, qui exige des compétences à la fois linguistiques, culturelles et stylistiques. Explorons ici ce qu’est une localisation, en quoi elle diffère de la traduction traditionnelle, et pourquoi elle relève davantage d’un travail de styliste que de linguiste.
SOMMAIRE :
1 - La traduction, au-delà d'une simple conversion linguistique
2 - Localisation : un travail de styliste au service de la culture locale
3 - L10N : l’acronyme de la localisation
4 - Régionalisation : une étape encore plus fine de la localisation
5 - Ce qu’il faut retenir : l'impact de la localisation sur l'expérience utilisateur
Vous le savez, traduire est un processus par lequel le texte est converti d'une langue source vers une langue cible. Cela implique de transposer des mots, des phrases, et des concepts dans un autre code linguistique, tout en essayant de conserver le sens et l’intention originels. Cependant, si l’objectif premier de la traduction est une fidélité au texte original, elle n'implique pas nécessairement l'adaptation culturelle ou la prise en compte du contexte local.
La traduction, au-delà d'une simple conversion linguistique
Les limites de la traduction littérale
La traduction peut parfois se réduire à une simple conversion mot à mot, nommée « traduction littérale ». Ce type d’opération, bien qu'utile dans certains contextes techniques ou juridiques, montre vite ses limites dans les domaines plus créatifs ou commerciaux. Par exemple, certaines expressions idiomatiques, références culturelles, ou marques d’humour n’ont pas d’équivalent direct dans une autre langue. Traduites littéralement, elles perdent leur sens et leurs effets.
It’s raining cats and dogs est un cas classique. Passer vers l’expression « Il pleut des chats et des chiens » troublerait le locuteur francophone. Dans ce cas, il importe de saisir l’intention derrière l’expression pour aller chercher une expression équivalente dans la langue cible : « Il pleut des cordes ».
La traduction, bien qu’essentielle, s’avère donc insuffisante lorsque le texte ou le produit doivent s’adresser à un public culturellement différent. La localisation entre en scène !
Localisation : un travail de styliste au service de la culture locale
Il s’agit ainsi de passer outre la simple conversion linguistique. Le contenu se verra certes adapté à la langue cible, mais aussi aux spécificités culturelles, légales et sociales d’un pays ou d’une région particulière. Autrement dit, la localisation est un processus qui prend en compte le contexte global dans lequel le texte ou le produit sera utilisé.
Faire entrer la langue dans un rythme nouveau
Adapter les références culturelles
Moins original, mais tout aussi nécessaire : l’adaptation des références culturelles. La publicité américaine mentionnant Thanksgiving n’aurait aucun impact en France, puisque nous ne célébrons pas cette fête. Un texte localisé pour le marché français pourrait remplacer cette référence par une autre fête nationale, comme le 14 juillet.
On pourrait dire que la localisation relève davantage du travail de styliste que de linguiste, car il ne s’agit pas uniquement de traduire des mots, mais de modeler l’expérience utilisateur pour qu’elle soit fluide, naturelle, et en phase avec la culture locale. La localisation exige donc une profonde connaissance non seulement de la langue, mais aussi des valeurs, des habitudes et des préférences du public cible.
Localiser l’article technique d’un éditeur de logiciel américain supposera toutes sortes d’opérations. À l'oreille d’un français, le texte d’origine, traduit littéralement, sera vraisemblablement lourd, plat, répétitif. Il faudra le faire passer à travers toutes sortes de filtres stylistiques, à commencer par des jeux de rythmes.
Localiser ne consiste pas seulement à traduire, mais à réinventer un message qui aura le même impact émotionnel dans une autre langue. L’affaire est capitale. Elle est aussi subtile.
L10N : l’acronyme de la localisation
Le terme L10N est souvent utilisé pour désigner la localisation. Cet acronyme provient du fait qu’il y a 10 lettres entre le « L » et le « N » dans le mot « localization » en anglais. Cet usage est commun dans les industries technologiques et dans le milieu de la traduction professionnelle, où les termes techniques sont fréquemment abrégés.
L’utilisation de l’acronyme L10N reflète l’aspect technique et multidimensionnel du processus de localisation. Il ne s’agit pas seulement de maîtriser deux langues, mais de savoir comment ajuster tous les aspects d’un produit (texte, design, format de date, devise, unités de mesure, etc.), pour les rendre pertinents dans un contexte spécifique.
Régionalisation : une étape encore plus fine de la localisation
Il est important de noter que la localisation peut parfois être poussée plus loin avec ce qu’on appelle la régionalisation. Alors que la localisation s’adresse à un marché national ou linguistique, la régionalisation permet d’adapter un produit ou un contenu à des sous-groupes géographiques plus restreints.
Par exemple, en Espagne, la localisation d’un site web peut impliquer de proposer une version en espagnol castillan pour Madrid, mais aussi des versions en catalan, basque, ou galicien pour les régions autonomes. Chaque langue ayant ses spécificités, la régionalisation assure que les publics locaux se sentent représentés et respectés.
Il en va de même côté français et, dans certains cas, il est légitime de chercher à adapter le contenu selon les régions françaises qui présentent des disparités linguistiques, historiques et culturelles notables. Par exemple, dans le sud de la France, notamment en Provence ou en Corse, certaines références locales peuvent enrichir la communication. Les traditions culinaires, les expressions régionales, ou des festivités telles que la Fête de la Lavande ou les festivals de polyphonie corse, sont des opportunités de personnalisation du message marketing. Une excellente voie pour renforcer les sentiments d’appartenance et d’authenticité.
Ce qu’il faut retenir : l'impact de la localisation sur l'expérience utilisateur
Une bonne localisation améliore considérablement l’expérience utilisateur. Elle permet au public cible de se sentir proche du produit, car celui-ci lui parle dans un langage qui fait écho à sa culture et à ses habitudes. Elle a un rôle majeur dans la fidélisation d’un client qui se sent compris et respecté. À l’inverse, le texte mal localisé (ou simplement traduit) peut sembler étranger, impersonnel, voire offensant.
En somme, la localisation est bien plus qu’une simple traduction de contenu. C’est un processus d’alignement culturel et stylistique.