9 idées reçues sur le métier de prête-plume
SOMMAIRE :
1 - Le prête-plume vole le mérite de l'auteur
2 - Faire appel à un prête-plume est malhonnête
3 - Le prête-plume impose son style à l'auteur
4 - Le métier de prête-plume est facile
5 - Les prête-plumes sont des écrivains ratés
6 - Un prête-plume coûte trop cher
7 - Le prête-plume n'a pas de droits sur l'œuvre
Le métier de prête-plume, parce que discret, souffre de représentations figées. Pourtant, derrière la confidentialité et les mystères de cette activité se cache une expertise réelle qui traite la page blanche à grands coups de sulfateuse. Explorons, tout en légèreté, neuf préjugés courants.
1. Le prête-plume vole le mérite de l'auteur
C’est une croyance très ancrée, mais erronée dans la majorité des cas. Il est vrai que la délégation du travail est parfois totale, mais cela arrive principalement dans le cadre d’une rédaction de discours. Le chef d’entreprise s’est engagé à dire quelques mots, il est pris par le temps... il doit néanmoins faire bonne figure et son rédacteur de confiance prend alors l'affaire en main.
(À toutes fins utiles, voici un exemple de brief pour gagner du temps dans la rédaction de discours)
Lorsqu’il s’agit de composer un livre, il en va très différemment et la plume travaille en étroite collaboration avec l'auteur. Elle met en forme les idées, les expertises, les expériences du signataire, sans s'approprier le contenu. L'objectif, ici, sera de servir la vision de l'auteur, non de la supplanter.
J’ai souvenir de missions durant lesquelles j’ai considérablement appris, ne serait-ce que parce qu’il fallait aborder un secteur dont j’ignorais tout. C’est alors d’un travail de mise en forme qu’il s’agissait. Il fallait souffler dans les idées comme on gonfle un ballon. Il fallait trouver le ton qui emporte. Il fallait glisser l'humour qui séduit, la pédagogie qui retient. Je n'ai rien inventé, j'ai seulement déployé.
Le signataire du livre confie un contenu brut, et charge au ghostwriter de le mettre en musique, de le clarifier ou de l’étoffer.
2. Faire appel à un prête-plume est malhonnête
Figurez-vous que la pratique est à la fois courante et... légitime. De nombreux leaders, artistes et personnalités publiques y ont recours pour s'assurer que leur message soit transmis de manière efficace et professionnelle.
En un sens, il y a même une politesse dans cette démarche. Le personnel politique est tenu à la clarté, à la cohérence, et l’intervenant dans un congrès doit soigner la résistance nerveuse de son public. Ici comme ailleurs, les compétences ne tombent pas du ciel et il n’y a aucun mal à se faire aider.
(Quelques conseils pour trouver son prête-plume)
Un cas, néanmoins, peut soulever des questions éthiques : celui de l’écrivain ayant délégué l’essentiel de son travail. L’écriture étant théoriquement sa compétence première, quelque chose comme un abus de confiance peut alors être pointé… Ceci dit, le statut de l'auteur pose mille problèmes et ma thèse universitaire en est une illustration...
3. Le prête-plume impose son style à l'auteur
Un prête-plume professionnel sait s'adapter au style et à la voix de l'auteur. C’est le cœur même de sa mission. Il y a là une élaboration progressive, qui s’affine dans le temps de la collaboration, mais dont les grandes lignes doivent rapidement être déterminées.
Objectif : refléter une personnalité et ses intentions, garantir un parfum d’authenticité dans le contenu produit. Le style d’écriture et la structuration de l’ouvrage sont effectivement deux points de vigilance. La règle est simple : le texte pertinent sera le texte avec lequel vous serez à l’aise.
Ne pas écrire « à la place de ». Écrire « avec ».
4. Le métier de prête-plume est facile
Écrire pour autrui demande de l’empathie, une écoute attentive, et la culture générale permettant de frayer au sein de sujets variés, parfois très techniques. Nous sommes loin du simple service de rédaction.
Outre les compétences rédactionnelles, il faut donc faire montre d’une adaptabilité constante. Mais, soyons honnête : aucune plume ne saurait couvrir absolument toutes les thématiques. Les écarts entre un livre de recettes turques, la peinture de la Renaissance italienne, les révolutions logicielles dans l’industrie et le droit européen des affaires sont tout de même assez conséquents… Bien naturellement, il existe des rédacteurs spécialisés dans chaque secteur d’activité.
5. Les prête-plumes sont des écrivains ratés
Vilain stéréotype ! Notez qu’il se porte aussi les critiques littéraires...
Et puis, que faut-il entendre par « écrivain raté » ? Comment pourrait-on être un écrivain raté ? Est-ce à dire que le succès se fait attendre ? Ce serait un regard bien limitant (et bien limité). L’écrivain inconnu n’en est pas moins écrivain. Sauf à faire de l’écrivain une posture sociale, avec la reconnaissance qui l’accompagne. Mais, là encore, c’est faire peu de cas des ambitions véritablement littéraires.
En fait, l’écrivain, comme le journaliste, comme le poète, s’engagent d’abord pour les honneurs dans ce rude affrontement avec la langue. Ils sont portés par une nécessité interne. Ce qui explique, d'ailleurs, une certaine fantaisie (ou une franche dinguerie...).
Il y a mille et une manières de vivre (de) sa plume.
Bref : faux.
6. Un prête-plume coûte cher
Les tarifs des prête-plumes varient en fonction de l'expérience, de la complexité du projet et de sa durée. Il est possible de trouver des professionnels adaptés à différents budgets, certain offrant un excellent rapport qualité-prix. Cependant, les devis trop alléchants sont évidemment suspects. Demandez toujours un test sans engagement, sait-on jamais.
Quoi qu’il en soit, la composition d’un manuscrit de deux-cents pages est chronophage. Osez le nier ! Quel que soit le taux horaire pratiqué par le ghostwriter, il lui faudra plusieurs semaines (plus vraisemblablement des mois...) de travail.
En savoir davantage sur les tarifs des prête-plumes.
7. Le prête-plume n'a pas de droits sur l'œuvre
Les droits et responsabilités sont définis par contrat entre le prête-plume et l'auteur. Dans certains cas, le prête-plume peut être reconnu comme co-auteur ou bénéficier de droits spécifiques, selon les accords établis.
Vous bâillez ! Je le vois, nom de nom, VOUS BÂILLEZ !
En un mot, tout le spectre des possibles se présente en début de collaboration.
En savoir davantage sur les droits d’auteur du prête-plume.
8. Faire appel à un prête-plume est réservé aux célébrités
Bien que les personnalités publiques y aient souvent recours (les enjeux sont considérables), de nombreuses personnes, qu'elles soient entrepreneurs, chercheurs ou particuliers, font appel à des prête-plumes pour divers projets, tels que des mémoires, des articles ou des discours. J’ai pu écrire quantité de tribunes en ligne pour des personnes cherchant, précisément, à augmenter leur notoriété.
Par ailleurs, les coachs ou les formateurs aiment à travailler le livre comme un support à la fois didactique, marketing et commercial. Nul besoin d’être une sommité pour prendre le parti de la diffusion.
Au contraire…
9. Le prête-plume travaille toujours dans l'ombre
Si la discrétion est une composante clé du métier, certains prête-plumes sont crédités pour leur travail, notamment dans des collaborations où leur contribution est publiquement reconnue. Tout dépend des accords passés avec le signataire et/ou la maison d’édition. Quelques exemples :
Aucune mention
Mention implicite comme co-auteur
Attribution en tant que collaborateur éditorial
Il est vrai que la confidentialité est une composante essentielle de ce type de missions, en particulier pour les biographies ou les discours.
L'écrivain fantôme peut être mentionné dans les remerciements, souvent au début. C’est une reconnaissance subtile de son apport, sans pour autant lui attribuer un rôle d’auteur.
Dans certains contextes, le prête-plume peut être crédité comme « collaborateur éditorial » ou « consultant rédactionnel ». Une pratique est courante dans les publications professionnelles (un livre blanc, par exemple) ou les rapports d’entreprise.